Ecophyto V2 La distribution réagit après les annonces de Stéphane Le Foll sur les CEPP
Le ministre de l'Agriculture a dévoilé les grands axes du plan Ecophyto V2 et les premières modalités des CEPP (certificats d'économie de produits phytos), le 30 janvier à Paris.
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Le 30 janvier, au ministère de l'Agriculture s'est tenue la conférence nationale « 2015 - l'An I de l'agro-écologie ». Lors de la matinée se sont déroulés les comités nationaux d'orientation et de suivi du plan Ecophyto, puis du projet agro-écologique. L'après-midi, Stéphane Le Foll a présenté les orientations des plans, et notamment la mise en place des CEPP (certificats d'économie de produit phytos), qui vont impacter la distribution agricole.Réduction de 20 % d'ici à 2020« Les CEPP ont pour objectif d'engager une démarche à cinq ans de réduction des produits phytosanitaires de 20 % pour les distributeurs », a indiqué le ministre. Avec un objectif de résultat, car, ajoute Stéphane Le Foll, « si on reste sur des engagements [...] certains vont attendre que ça se passe ». Plus précisément, « au bout de cinq, si on n'a pas atteint 20 % de réduction, il y aura une pénalité financière de 11 euros par Nodu (nombre de doses unités), c'est-à-dire le nombre de traitements moyens appliqués annuellement (ndlr). Ceux qui auront été plus loin que les 20 % pourront vendre le Nodu à 11 euros à ceux qui n'ont pas atteint les 20 % », explique le ministre, pour qui cet objectif « est tout à fait possible ».Des actions valant réduction de NoduPour réduire le Nodu, des actions devront être menées, par exemple la vente ou le conseil d'équipements de précision ou la promotion du biocontrôle. Chaque action vaut une diminution de Nodu. Pour InVivo d'ailleurs, ces Nodu ne peuvent constituer l'unique mesure de l'efficacité du plan.
Depuis la première proposition des CEPP dans le rapport Guillou en 2013, une mission d'appui a rédigé en 2014 un rapport intitulé « Préfiguration de la mise en oeuvre des certificats d'économie de produits phytosanitaires », disponible en ligne. Les modalités indiquées par Stéphane Le Foll restent pour le moment assez floues en comparaison avec les recommandations du rapport de la mission d'appui. Un groupe de travail va être mis en place pour réfléchir en détail à la mise en place de l'expérimentation CEPP, prévue dans la loi d'avenir agricole.
« 20 % », le chiffre qui fâche
« Les coopératives sont favorables à l'agro-écologie et elles n'ont pas attendu 2015 pour rentrer dans la démarche, rappelle Vincent Magdelaine, directeur de Coop de France Métiers du grain. Nous sommes convaincus qu'il existe des voies de progrès, mais nous voulons souligner l'importance du facteur temps : la mise au point de méthodes et leur diffusion prend du temps. C'est pourquoi l'objectif de moins 20 % à cinq ans nous semble très excessif. Faire peser sur les seuls distributeurs la responsabilité, y compris financière, d'un échec alors qu'ils sont loin de maîtriser les décisions prises par une multitude d'acteurs n'est pas acceptable. »
Même son de cloche du côté de la Fédération du négoce agricole : « Notre position a toujours été oui aux bonnes pratiques, non aux pénalités financières, qui mettent en péril les entreprises, déclare Sébastien Picardat, directeur de la FNA. Le raisonnement nous semble erroné : comment pénaliser un acteur économique alors qu'il n'est ni décisionnaire, ni à même de mettre en place les actions pour atteindre ces réductions. »
Insécurité juridique et circuits parallèles
Vincent Magdelaine souligne aussi que le système « va potentiellement créer de l'insécurité juridique pour les distributeurs, car ils vont apprendre au bout de cinq ans s'ils sont dans les clous ou non. Devraient-ils alors provisionner dès maintenant ? » Autre point soulevé : les achats de produits phytos par les agriculteurs hors France. Le système « encourage d'autres sources d'approvisionnement, en dehors de la France, voire par des circuits illégaux », ajoute Sébastien Picardat.
Position commune de Coop de France et de la FNA
Lundi 2 février, Coop de France Métiers du grain et la Fédération du négoce agricole sont même allées jusqu'à diffuser un communiqué de presse commun dans lequel les organisations disent approuver les grandes orientations de la version 2 du plan. En revanche, elles ne peuvent accepter que les distributeurs soient « les boucs émissaires d'un effet d'annonce du ministre de l'Agriculture » et soient « seuls à supporter la responsabilité financière de l'atteinte d'un objectif disproportionné dont ils sont loin de détenir toutes les clés ».
Augmentation de la RPD
Stéphane Le Foll a aussi annoncé une augmentation de l'assiette de la redevance pour pollutions diffuses de 30 millions d'euros, la faisant passer à 70 millions d'euros.Pour les ONG, l'objectif de réduction de 20 % n'est pas satisfaisant : « Impliquer les distributeurs dans la réduction est une approche intéressante, mais l'objectif de 20 % n'est pas assez ambitieux », estime Jean-Claude Bévillard, vice-président de France nature environnement en charge des questions agricoles.Quant à l'UIPP, elle « plaide pour une démarche incitative et non une politique d'écologie punitive, instaurant des systèmes de pénalité ».
Marion Coisne
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